19 octobre 2009

Quelle attitude adopter en cas de sous-évaluation d’un apport en nature?

 

La mission du réviseur d’entreprises appelé à intervenir dans une augmentation de capital par apport en nature est d’établir un rapport qui : « porte notamment sur la description de chaque apport en nature et sur les modes d'évaluation adoptés. Il indique si les estimations auxquelles conduisent ces modes d'évaluation correspondent au moins au nombre et à la valeur nominale ou, à défaut de valeur nominale, au pair comptable et, le cas échéant, à la prime d'émission des actions à émettre en contrepartie. Le rapport indique quelle est la rémunération effectivement attribuée en contrepartie des apports.» (art. 602, §1er, al. 2 et 3 C. Soc.).

 

/ « Le commissaire ou, lorsqu'il n'y a pas de commissaire, un réviseur d'entreprises désigné par l'organe d'administration, examine dans le rapport visé à l'article 7:179, § 1er, alinéa 2, la description faite par l'organe d'administration de chaque apport en nature, l'évaluation adoptée et les modes d'évaluation appliqués. Le rapport indique si les valeurs auxquelles conduisent ces modes d'évaluation correspondent au moins au nombre et à la valeur nominale ou, à défaut de valeur nominale, au pair comptable et, le cas échéant, à la prime d'émission des actions à émettre en contrepartie. Le rapport indique quelle est la rémunération réelle attribuée en contrepartie des apports.» (art. 7:197, §1er, al. 2 CSA)

 

La volonté du législateur est d’informer clairement l’assemblée, qui décidera de l’augmentation de capital, sur la nature des apports, sur les valeurs attribuées – qui ne peuvent être surestimées –, ainsi que sur la rémunération effective qui sera attribuée aux apporteurs.

 

Dans la publication de 2006 de l’Etude IRE intitulée Apport en nature et quasi-apportCas pratiques on lit en pages 4 et 5 : « Le cas échéant, les fondateurs, ou l’organe de gestion en cas de d’augmentation de capital, sont tenus solidairement de la réparation du préjudice qui constitue une suite directe de la surévaluation des apports. En cas de sous-évaluation, un commentaire est également souhaité, car même si elle bénéficie aux tiers, les nouveaux actionnaires pourraient être préjudiciés lors d’une augmentation de capital. ».

 

De plus, le point 4.1.2. des Normes relatives au contrôle des apports en nature et des quasi-apports, prescrit que les conclusions du rapport mentionnent au moins si : « les modes d’évaluation de l’apport en nature arrêtés par les parties sont justifiés par les principes de l’économie d’entreprise et conduisent à des valeurs d’apport qui correspondent au moins au nombre et à la valeur nominale ou, à défaut de valeur nominale, au pair comptable et, le cas échéant, à la prime d’émission des actions ou parts à émettre en contrepartie, de sorte que l’apport en nature n’est pas surévalué. ».

 

Dans la mesure où les vérifications amènent le réviseur d’entreprises à constater que l’apport est sous-évalué, il faudra généralement en déduire que la valeur retenue ne résulte pas de l’application de modes d’évaluation justifiés par l’économie d’entreprises. Bien que ce ne soit pas le but premier de son intervention, le réviseur d’entreprises devra évidemment faire part de cette sous-évaluation dans le corps de son rapport.

 

Le point 4.2. des Normes précitées énonce en outre que : « Si le réviseur d’entreprises ne peut pas se rallier aux propositions des fondateurs ou de l’organe de gestion en ce qui concerne la description ou l’évaluation de l’apport en nature dans leur totalité, il formule des réserves résumant en termes clairs les raisons de celles-ci. ».

 

Il paraît dès lors nécessaire d’en tenir également compte dans les conclusions par exemple en libellant comme suit le paragraphe concerné des conclusions : « Bien que les modes d’évaluation retenus par les parties ne respectent pas les principes usuels applicables en économie d’entreprise et conduisent ainsi à une valeur d’apport  purement conventionnelle, qui néanmoins correspond  au moins au nombre et à la valeur nominale (…) de sorte que l’apport n’est pas surévalué, (...). ».

 

En toute hypothèse, le réviseur d’entreprises doit s’interroger sur les vraies raisons de la   sous-évaluation qu’il rencontre. Cela pourrait être la conséquence de l’existence d’une rémunération cachée ou d’un  autre avantage : dans une telle hypothèse, il devrait prendre ses distances avec le rapport de l’organe de gestion et faire état de cette rémunération « complémentaire ». Cela pourrait également être le cas, tout à fait justifié, où il y a identité entre les apporteurs et les actionnaires préexistants. En tel cas, la sous-évaluation ne préjudicie personne.