7 juin 2022
Qui réalise les rapports d’évaluation sur les deux tests de liquidité dans la situation d’une intercommunale avec rotation externe du réviseur d’entreprises et que se passe-t-il avec le délai de signature?
« Contexte : Les intercommunales sont soumises au Code des sociétés et des associations pour autant que les statuts n’y dérogent pas en raison de la nature spéciale de l’association (code de la démocratie locale au décret RW 30/04/2009 instituant la rotation externe du réviseur).
Nous sommes confrontés à la situation suivante :
- L’intercommunale est une SC ;
- l’AGO aura lieu fin juin ;
- la rotation de notre cabinet aura lieu à l’issue de cette AGO ;
- la distribution d’un solde de dividendes calculé sur les comptes 2021 audités par notre cabinet sera actée lors de cette AGO ;
- la distribution d’un acompte sur dividendes 2022 sera actée lors de cette AGO ;
- juridiquement, nous ne sommes plus commissaire à l’issue de l’AGO ;
- ces deux montants devraient être versés début juillet 2022 ;
- les rapports sur les tests de liquidité doivent être signés au plus proche de la date de paiement, et en tout état de cause après que la décision de distribution ait été prise ;
- la désignation du prochain réviseur est prévue lors de cette AGO, mais devra attendre un mois pour être rendue effective (loi sur les marchés publics).
La question est : qui réalise les rapports d’évaluation sur les deux tests de liquidité ? Selon nous, le rapport concernant le test de liquidité pour le solde 2021 pourrait être signé par notre cabinet. La question sous-jacente est de savoir : peut-il être signé avant l’AGO, avec une mention de la condition suspensive de l’approbation de cette distribution en AGO? Si cette logique est admissible, le rapport portant sur le test de liquidité pour l’acompte 2022 pourrait être signé antérieurement à l’AGO également, toujours avec mention de la condition. »
Toutefois, il est conseillé à l'organe d'administration de ne pas attendre que l'assemblée générale décide de procéder à la distribution pour effectuer le test de liquidité, mais de déjà préparer ce test avant l'assemblée générale qui doit se prononcer sur la distribution([2]). Cette préparation peut être considérée comme un "pré-test", en quelque sorte.
En l'absence de dispositions légales spécifiques et de jurisprudence en la matière, l’ICCI est d’avis que rien n'interdit à l'organe d'administration de procéder formellement à un test de liquidité avant l'assemblée générale, à condition que (i) la période couverte par le test de liquidité couvre au moins douze mois à partir de la date de distribution effective et que (ii) l'organe d'administration garantisse qu'il n'y a pas d'élément très significatif qui impactera le test de liquidité jusqu'à la distribution et vérifie qu'il n'est pas devenu obsolète. Si un événement de cette nature devait se produire, il incomberait à l'organe d’administration de procéder à un nouveau test.
A partir du moment où le test de liquidité est disponible, le commissaire peut remplir la tâche qui doit être accomplie avant le paiement effectif du dividende par l'organe d’administration.
(1) la répartition du bénéfice de l’exercice précédent (art. 6:114, al. 1er CSA) ;
(2) l’acompte sur dividende (art. 6:114, al.2 CSA).
Au vu de ce qui précède, l’ICCI est d’avis qu’en l’espèce le commissaire actuellement en fonction pourrait signer le rapport relatif au test de liquidité dans le cadre de la distribution du solde 2021 (situation 1) avant la date de l’assemblée générale appelée à se prononcer sur la distribution. En effet, cette décision se trouve à l’ordre du jour de l‘assemblée générale, il sera a priori procédé au paiement dans un délai relativement court (début juillet) après la décision de distribution (fin juin) et le commissaire actuellement en fonction reste commissaire jusqu’à l’issue de l’assemblée générale appelée à se prononcer sur la question.
L’ICCI souhaite toutefois attirer l’ attention sur le fait qu’il n’y aura plus de commissaire pour effectuer la surveillance d'une absence de dégradation de la situation de trésorerie de la société entre le moment de sa signature et le moment du paiement (étant donné que le(commissaire) successeur ne sera pas désigné concomitamment à l’échéance de votre mandat).
« Les statuts peuvent déléguer à l'organe d'administration le pouvoir de procéder, dans les limites des articles 6:115 et 6:116, à des distributions provenant du bénéfice de l'exercice en cours ou du bénéfice de l'exercice précédent tant que les comptes annuels de cet exercice n'ont pas été approuvés, le cas échéant réduit de la perte reportée ou majoré du bénéfice reporté. »
La décision de distribution d’un acompte relève dès lors de la seule compétence de l’organe d’administration, à condition que les statuts lui en aient délégué le pouvoir et que la distribution provienne soit du bénéfice de l’exercice en cours, soit du bénéfice de l’exercice précédent, et ce tant que les comptes annuels de cet exercice n’ont pas été approuvés. Il n’existe pas de limitation quant au moment où il peut être procédé à une distribution provenant des bénéfices de l’exercice en cours ([3]). Par contre, le pouvoir de distribuer des réserves ne peut être délégué, car cela reviendrait à accorder à l’organe d’administration le pouvoir de revenir sur une décision antérieure de l’assemblée générale concernant l’affectation des bénéfices ([4]).
En outre, les bénéfices de l'exercice en cours doivent, conformément à l’article 6:115 CSA, ressortir d’un état récent de la situation active et passive assorti d’un rapport d’évaluation du commissaire sur cet état ([5]).
Au vu de ce qui précède, l’ICCI est d’avis que la solution décrite ci-dessus pourrait également s’appliquer, pour autant qu’une délégation soit statutairement prévue et que le commissaire établisse un rapport d’évaluation de l’état résumant la situation active et passive dans le cadre du test d’actif net (art. 6:115, al.2 CSA), en plus de son rapport d’évaluation dans le cadre du test de liquidité (6 :116, al.2 CSA).
Enfin, l’ICCI souhaite attirer l’attention sur le fait que le commissaire doit disposer de suffisamment de temps pour effectuer les travaux nécessaires à cet égard, afin d’être en mesure de remettre son rapport à temps. À défaut d’avoir reçu les documents en temps utile et s’il n’est plus en mesure de respecter le délai, il est recommandé qu’il émette une abstention de conclusion.
- Soit le rapport relatif au test de liquidité est signé avant le rapport de commissaire : dans ce cas la mention doit être intégrée dans le rapport de commissaire 2021.
- Soit le rapport relatif au test de liquidité est signé après le rapport de commissaire : dans ce cas il ne serait pas possible d’intégrer la mention dans le rapport de commissaire. En l’espèce, puisque le commissaire actuellement en fonction arrive au terme de son mandat, le nouveau commissaire devra inclure la référence au rapport distinct sur le test de liquidité dans son rapport de commissaire sur l'exercice suivant (in casu, 2022) en indiquant que le rapport distinct sur le test de liquidité a été préparé par le commissaire qui l'a précédé, en incluant le nom du commissaire précédent ainsi que la date du rapport distinct sur le contrôle des liquidités en question([7]).
([1]) IRE, Projet de norme relative à la mission du commissaire prévue par les articles 5:143 et 6:116 du Code des sociétés et des associations (Test de liquidité ), approuvé par le Conseil le 28 mai 2021, cf.
([2]) IRE, Note technique relative aux articles 5:143 et 6:116 du Code des sociétés et des associations (Test de liquidité), approuvé par le Conseil le 30 août 2019, p.5, point 8, cf.
([3]) E.-J. Navez et A. Navez., “Le Code des sociétés et des associations”, 1e édition, Bruxelles, Larcier, 2019, p. 122.
([5]) Voir également le §13 du Projet de norme relative à la mission du commissaire prévue par les article 5 :142 et 6 :115 du Code des sociétés et des associations (Test d’actif net), approuvé par le Conseil le 28 janvier 2022, cf.