5 janvier 2021

Dans le cadre d’une procédure de révocation du commissaire doit-il être convoqué à l’assemblée générale extraordinaire qui va statuer sur sa révocation ? Plus généralement, le commissaire doit-il être convoqué à toutes les assemblées générales de la société ou uniquement à celle(s) qui statue sur base de son rapport ?

 

  1. La question suivante est posée:

     

    « 

     

    Je suis avocat au Barreau de Bruxelles et dans le cadre d’un dossier pour lequel je dois conseiller ma cliente, j’ai deux questions relativement précises que je soumets à votre analyse (relativement urgentes).

     

    Ma cliente est une SPRL (SRL). Elle est non-cotée mais est dans l’obligation de nommer un Commissaire aux comptes ce qu'elle a fait. Ma cliente a activé récemment la procédure de révocation telle que prévue par le CSA. Dans ce cadre, elle n’a pas convoqué formellement le Commissaire à l’assemblée générale extraordinaire qui devra se tenir prochainement mais a bien entendu respecté la procédure en ce sens que le Commissaire a été tenu au courant de l’inscription de ce point de révocation à l’ordre du jour d’une part et, d’autre part, a eu l’occasion d’émettre par écrit ses observations qui ont été bien entendu soumises à l’intégralité des actionnaires.

     

    D’après notre analyse, une telle convocation n’est pas obligatoire. Plus généralement, le Commissaire doit-il être convoqué à toutes les assemblées générales de la société ?

     

    Nous comprenons du CSA que le Commissaire doit être convoqué pour les assemblées générales sur lesquelles il faut discuter d’un rapport qu’il a rédigé ce qui est évident. Par contre, nous ne pensons pas que ce soit le cas pour toutes les AG (en ce compris les AGE).

     

    Pourriez-vous dès lors nous éclairer et nous donner un avis quant à cette interprétation sur les deux questions précises, à savoir :

    -        Le Commissaire doit-il être convoqué à l’assemblée générale extraordinaire qui va statuer sur sa révocation ?

    -        Plus généralement, le Commissaire doit-il être convoqué à toutes les assemblées générales de la société ou uniquement à celle(s) qui statue sur base de son rapport ?

     

    »

     

  2. La mission de la Fondation ICCI consiste à dispenser des avis :

     

    -        aux réviseurs d’entreprises sur des sujets concernant leurs missions révisorales, au sens de l’article 3, 10° de la loi du 7 décembre 2016 portant organisation de la profession et de la supervision publique des réviseurs d’entreprises, sauf si des circonstances particulières ne rendent inopportune l’adoption d’un avis (contexte litigieux, questions de nature essentiellement fiscale, …) La Fondation répond aux questions des réviseurs d’entreprises concernant les IFRS, sauf si elle juge que la question comporte un degré de complexité très élevé.

    -        aux tiers sur des sujets concernant les réviseurs d’entreprises et leurs missions, sauf qu’il ne sera pas donné suite aux questions posées dans un contexte litigieux, aux questions de nature comptable ou fiscale, aux questions controversées ou aux questions imprécises. Seul le Collège de supervision des réviseurs d'entreprises est habilité à traiter de plaintes à l'égard de réviseurs d’entreprises (art. 53, § 2 de la loi du 7 décembre 2016).

     

    Etant donné que la question est posée dans un contexte litigieux, nous ne pouvons traiter vos questions qu’en termes généraux.

     

  3. L’article 3:67 du CSA dispose que qui suit :

     

    « Si l'assemblée générale est appelée à délibérer sur la révocation d'un commissaire, l'inscription de cette question à l'ordre du jour doit immédiatement être notifiée à l'intéressé. Le commissaire peut faire connaître par écrit à la société ses observations éventuelles. Ces observations sont annoncées dans l'ordre du jour et elles sont mises à la disposition des actionnaires, conformément aux articles 5:84, 6:70, § 2, et 7:132. Un exemplaire de ces observations est également transmis sans délai aux personnes qui ont accompli les formalités requises pour être admises à l'assemblée générale.

      La société peut, par requête adressée au président du tribunal de l'entreprise et notifiée préalablement au commissaire, demander l'autorisation de ne point communiquer aux actionnaires les observations qui sont irrelevantes ou de nature à nuire injustement au crédit de la société. Le président du tribunal de l'entreprise entend la société et le commissaire en chambre du conseil et statue en audience publique. Sa décision n'est susceptible ni d'opposition ni d'appel. ».

     

    Sur la base de l’article précité, en réponse de votre première question, l’ICCI  peut vous confirmer que l’assemblée générale appelée à délibérer sur la révocation d’un commissaire, même s’il s’agit d’une assemblée générale extraordinaire, doit toujours être notifiée au commissaire et ce dernier doit être convoqué à cette assemblée générale (voir Bruxelles, 16 mai 2000, R.W., 2000-2001, n° 33, p. 1241-1244) ( [1] ).

     

    Le commissaire a le droit d’assister à l’assemblée générale de la société ; c’est ce qui ressort du fait qu’il doit en effet être invité à assister à l’assemblée générale (ordinaire, extraordinaire et spéciale)    ( [2] ).

     

    Par conséquent, l’ICCI est d’avis que le commissaire doit être convoqué à toutes les assemblées générales (extraordinaires ou pas) qui statuent sur sa révocation.

  4. Quant à la deuxième question, l’ICCI se réfère à l’article 5:83 du CSA, qui énonce :

 

«L'organe d'administration et, le cas échéant, le commissaire, convoquent l'assemblée générale et en fixent l'ordre du jour. Ils doivent convoquer l'assemblée générale dans un délai de trois semaines lorsque des actionnaires qui représentent un dixième du nombre d'actions en circulation le demandent, avec au moins les points de l'ordre du jour proposés par ces actionnaires.

  La convocation à l'assemblée générale contient l'ordre du jour avec les sujets à traiter.

 Elle [la convocation à l’assemblée générale] est communiquée, conformément à l'article 2:32, au moins quinze jours avant l'assemblée, aux actionnaires, aux actionnaires sans droit de vote, aux titulaires d'obligations convertibles nominatives, de droits de souscription nominatifs ou de certificats nominatifs émis avec la collaboration de la société, aux membres de l'organe d'administration et, le cas échéant, au commissaire. ».

 

Lorsque l’assemblée générale doit délibérer sur la base d’un rapport établi par le commissaire, la présence du commissaire est légalement déontologiquement requise ; dans les autres cas, le commissaire pourra assister à l’assemblée s’il le souhaite, pour y prendre la parole concernant l’exercice de son mandat, mais il n’est pas obligé ( [3] ).

 

De ce qui précède, l’ICCI estime que le commissaire doit être convoqué à toutes les assemblées générales de la société, donc pas uniquement celle(s) qui statue(nt) sur base d’un rapport qu’il a établi.


( [1] ) Cf. IRE, Vademecum Tome I: Doctrine, Bruxelles, Editions Standaard, 2009, p. 549-551; IRE, Rapp. annuel, 2001, p. 135-137.

([2]) B. Tilleman, Le statut du commissaire, Bruges, éd. la Charte, 2007, p. 185, n° 300.

([3]) B. Tilleman, Le statut du commissaire, Bruges, éd. la Charte, 2007, p. 185, nos 301 et 302.