6 juin 2019
Notion d’opérations liées et limite de 3.000 €
Une concession automobile, agent d’une marque coréenne, reprend régulièrement des véhicules d’occasion dont une partie est revendue à des personnes physiques étrangères avec lesquelles des ventes sont réalisées épisodiquement. Ces dernières ne disposant pas de compte bancaires belges, la vente ne peut se réaliser que contre un paiement en espèces.
Le gérant de la concession automobile s’interroge sur la portée de l’article 67 de la loi «anti-blanchiment» du 18 septembre 2017 et plus précisément sur la notion d’opération ou d’un ensemble d’opérations qui semblent liées.
Par exemple :
la vente de deux ou plusieurs véhicules d’occasion à la même personne est-elle une opération liée : factures individuelles mais le même jour ?
la vente de deux ou plusieurs véhicules d’occasion à la même personne est-elle une opération liée : factures individuelles mais à des dates éloignées (de plusieurs semaines ou plusieurs mois) ?
un véhicule doit-il être considéré comme un bien isolé et dont la vente est indépendante d’un autre véhicule ?
doit-on considérer un cumul des opérations de vente réalisées envers une même personne pour l’appréciation de la limite des 3.000 € ?
Le peu d’informations dont l’ICCI dispose sur le cas ne permet pas en la circonstance de se prononcer sur le caractère lié ou non des ventes objets des interrogations. Sous toutes réserves et à titre d’exemple, l’ICCI peut signaler cependant qu’un véhicule ne doit pas toujours être considéré comme un bien isolé. La vente de plusieurs véhicules au même client le même jour (ou à quelques jours d’intervalle) portera une forte présomption de vente liée, même si une facture individuelle est établie par véhicule.
Par ailleurs, l’ICCI attire l’attention sur les deux considérations :
l’article 67 de la loi du 18 septembre 2017 relative à la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme et à la limitation de l’utilisation des espèces ne tient nullement compte d’un critère de périodicité pour limiter les paiements en espèces.
En outre, l’exposé des motifs de l’article 67 considère que les opérations présentant les critères cumulatifs suivant constitueront vraisemblablement des opérations liées :
D’autre part, selon l’exposé des motifs, les opérations scindées sans aucune raison constitueront certainement des opérations liées[1].
L’intention du législateur est donc de faire preuve de la plus grande fermeté en matière de paiements en espèces. Considérer que des ventes ne sont pas liées sur la seule base de la périodicité serait, à notre avis, contraire à la volonté du législateur;
il incombe au vendeur lui-même de déterminer si les ventes multiples apparaissent ou non liées (« know your client ») ; en cas de doute, rien n’empêche ce dernier (ou vous-même) de prendre contact avec le Service public fédéral Economie, P.M.E., Classes moyennes et Energie. Le SPF Economie a effectivement constitué un Contact Center (tél. : 0800-120-33 ; e-mail info.eco@economie.fgov.be), qui répond à toutes les questions pratiques et techniques ayant trait à la limitation des paiements en espèces.
Enfin, la procédure à suivre par le réviseur d’entreprises en cas de constatation d’une éventuelle infraction, dans le chef de son client, de la limitation de paiements en espèces, est décrite dans le communiqué commun IRE-IEC-IPCF du 13 décembre 2018 relatif au paiement en espèces[2].
[1] Doc. Parl. Exposé des motifs de la loi du 18 septembre 2017, n° 54 2566/001, p. 203
[2] Cf. https://www.ibr-ire.be/fr/actualites/news-detail/communique-commun-ire-iec-ipcf-lutte-contre-le-blanchiment-d-argent-et-le-financement-du-terrorisme-la-limitation-de-l-utilisation-des-especes