27 avril 2022
Suivant l’article XX.99, alinéa 1er, du Code de droit économique, le débiteur qui a cessé ses paiements de manière persistante et dont le crédit se trouve ébranlé est en état de faillite. La cessation persistante des paiements et l’ébranlement du crédit sont liés ; le débiteur n’est en état de cessation de paiement que s’il n’obtient plus de crédit ou s’octroie un crédit artificiel.
La société qui est mise en liquidation continue à bénéficier de crédit lorsque ses créanciers maintiennent leur confiance dans cette décision et dans le déroulement de la liquidation, pour autant que cette confiance soit obtenue dans la régularité et la transparence.
Il s’ensuit que la société dont la dissolution intervient en fraude des droits des créanciers ou a lieu à leur préjudice, en permettant d’échapper aux responsabilités particulières liées à l’état de faillite ou à la remise en cause d’actes accomplis en période suspecte, ne conserve pas la confiance des créanciers, lors même que ceux-ci n’auraient pas manifesté leur défiance.
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Il considère ensuite, s’agissant de l’existence d’« éléments indiquant que la liquidation pourrait avoir été entamée de manière préjudiciable pour les créanciers », qu’« il n’est pas exclu que la décision de dissolution et de mise en liquidation ait été décidée par les administrateurs de [la demanderesse] afin d’échapper à une éventuelle responsabilité pour poursuite déraisonnable des activités déficitaires » dès lors que celle-ci « connaît une situation largement déficitaire depuis plusieurs exercices », que, « malgré une première déclaration d’abstention du commissaire sur les comptes annuels arrêtés au 31 décembre 2015 et une déclaration mitigée sur la continuité sur les comptes arrêtés au 31 décembre 2016 […], le conseil d’administration a proposé la poursuite des activités » et que « la décision de dissolution semble avoir été prise de manière soudaine et précipitée en novembre 2017 alors que, le 29 juin 2017, le conseil d’administration indiquait pourtant que la société » avait adopté des « changements stratégiques et de positionnement [dont] les effets positifs escomptés seront attendus à partir d’octobre 2017 » et « sans que les organes de gestion aient jugé utile de faire appel à la lettre de confort émise en mai 2017 par l’actionnaire majoritaire ». Il ajoute que, s’agissant d’une information portant sur « des faits d’une participation de [la demanderesse] à un circuit de facturation frauduleuse ou de main-d’œuvre au noir en 2015 et 2016 », la demanderesse « bénéficie de la présomption d’innocence », mais que, « des devoirs [étant] toujours en cours », « un interlocuteur indépendant en la personne d’un curateur, mandataire de justice, représentant tant la société que les créanciers, se justifie ».
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Par ces énonciations, d’où il suit qu’aux yeux de la cour d’appel, qui n’a pas retenu l’existence d’une fraude, si le déroulement de la liquidation est exempt de tout reproche, il existe en revanche des indices que la décision même de mise en liquidation est préjudiciable aux créanciers en ce qu’elle les priverait du bénéfice d’actions pouvant être menées par un curateur et que, dès lors, la confiance des créanciers est factice, l’arrêt a pu, sans violer l’article XX.99 précité, décider que le crédit de la demanderesse était ébranlé et, partant, que les conditions de la faillite étaient réunies.