5 février 2016
Dans le cadre d’un mandat « difficile » de commissaire (refus d’attester en 2013 et procédure d’alerte), on a émis le 25 juin 2015 un rapport de carence pour les comptes 2014 la comptabilité n’étant pas disponible. Il s’en suit plusieurs rappels pour pouvoir effectuer la mission, sans succès.
Fin de l’année, on constate dans le cadre d’un suivi des dépôts des comptes BNB que la société a publié ses comptes le 23 octobre 2015 sous format abrégé (ce qui ne pose pas problèmes), bien évidemment sans le rapport de carence. On en a fait part à la société qui répond qu’elle ne désirait plus avoir de commissaire, n’étant plus dans les critères et qu’elle voulait rompre de commun accord le mandat.
Dans un second temps On lui a répondu que ce n’était pas possible mais là n’est pas la question.
On lit dans la publication ICCI – Le rapport de commissaire 2013, point 51, page 18 que le rapport de carence ne peut être déposé et être considéré comme équivalent au rapport du commissaire.
Questions :
Si le rapport de carence ne doit pas être publié ? Que peut-on faire à partir du moment où l’information financière existe mais qu’il est impossible de la vérifier n’ayant pas accès à cette dernière ? A part avertir la société, ses gérants et le tribunal de commerce pour les faire changer d’avis, on ne voit pas ce qu’on pourra faire. Doit-on émettre une absence d’opinion au sein d’un rapport alors qu’on n’a aucun élément qui permet de porter un jugement sur ces comptes ?
Tout d’abord, il paraît utile à l’ICCI de rappeler que de manière générale, la cessation du dépassement des critères de nomination d’un commissaire n’est pas considérée comme juste motif dans le cadre de la révocation du commissaire telle que régie par l’article 135, § 1er du Code des sociétés/ 3:66, §1er du Code des sociétés et des associations. Le fait de ne plus dépasser les critères ne peut donc sortir des effets pour la nomination du commissaire que si la situation perdure au terme de la période de trois ans.
Dans ce cas, la société ne sera plus tenue de nommer un commissaire pour l’exercice suivant. Pour plus d’informations, l’ICCI renvoie aux points 1.2.1. et 3.2.5. de la brochure ICCI 2007/2, Le statut du commissaire, du Prof. Dr. Tilleman (Bruxelles, la Charte, 2007, pp. 11, 12 et 85).
Par ailleurs, l’ICCI désire rappeler, à toutes fins utiles, qu’une rupture de mandat « de commun accord » n’existe pas en droit. Les seules possibilités de mettre fin à un mandat de commissaire sont la démission (par le commissaire) et la révocation (par l’assemblée générale). Il ne peut être question d‘un « accord » en cette matière.
La Commission juridique de l’IRE estime que le mandat de commissaire ne peut être considéré comme terminé que lorsque l’assemblée générale a entendu son rapport et s’est prononcée sur la décharge à accorder au commissaire (IRE, Vademecum, 2009, Tome I : Doctrine, Bruxelles, éd. Standaard, 2009, p. 611). Par conséquent, l’ICCI est d’avis que dans le cas qu’on porte à sa connaissance, le commissaire pourrait décider de convoquer lui-même l’assemblée générale (ou de demander à l’organe d’administration de le faire) pour expliquer sa situation, présenter son rapport de carence et éventuellement remettre sa démission. Par ailleurs, comme il s’agit d’une société sous le régime de la procédure de réorganisation judiciaire (PRJ), le commissaire appréciera s’il doit ou non, dans le respect de la procédure prévue par l’article 10 de la loi sur la continuité des entreprises (LCE)/ article XX.23 du Code de droit économique, informer le Tribunal de commerce/ de l’entreprise.
Pour en venir à la question précise, l’ICCI comprend que non seulement un rapport de carence a été émis temps opportun mais qu’en outre un rappel de ses obligations a été communiqué à l’organe de d’administration. Dans ces conditions, l’ICCI est d’avis que les obligations ont été remplies. En effet, la situation rapportée n’est réglée ni par la législation, ni par la doctrine et il serait sans doute opportun qu’un rapport de carence mentionnant, conformément à l’ISA 705 (révisée), § 9, l’impossibilité d’exprimer une opinion puisse être publié mais ceci n’est actuellement pas possible.
On pourrait toutefois juger nécessaire de rappeler une dernière fois ses obligations à l’organe d’administration et notamment la teneur de l’article 170 du Code des sociétés/ 3:96, 3° du Code des sociétés et des associations relatif à la répression des obstacles qui seraient mis aux vérifications objet de sa fonction. Si passé un délai raisonnable il n’y était pas donné une suite favorable on pourrait alors envisager la dénonciation de la situation au Tribunal de commerce/ de l’entreprise ainsi que la convocation de l’assemblée générale pour entendre la confirmation de son rapport de carence et recevoir sa démission aux torts de la société.
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